Accommodations
Je me passionne de loin pour le debat sur les accommodements raisonnables. Je suis tombe hier sur cette lettre publiee dans le Devoir, en reponse a l'argumentaire en deux parties de l'ex-ministre Paul Begin publie auparavant. C'est, selon moi, la meilleure analyse publiee jusqu'ici (et si vous avez mieux, je suis tout ouie).
Voici le lien : http://www.ledevoir.com/2007/02/09/130413.html
Voici le lien : http://www.ledevoir.com/2007/02/09/130413.html
2 commentaires:
Salut Simon!
Bonne chance pour ton excursion au pays de la junte...
La lettre publiée dans Le Devoir est intéressante; voici quelques observations qu'elle m'a inspirées. Elles seront accompagnées, pour un temps limité, de quelques commentaires sortis directement de mon cru.
Citations en italique.
Soulignons pour débuter que les demandes d'accommodements raisonnables sont généralement faites au nom même de ces droits et libertés.
Soulignons indeed. Soulignons, tout en corrigeant: l'auteur n'aurait même pas dû inclure le mot « généralement » dans ce postulat de départ (autrement fort pertinent). Les demandes d'accommodement sont toujours faites en vertu des droits et libertés qui figurent dans nos délicieuses yet nutritives Chartes (québécoise et canadienne) — en fait, l'existence de tels droits et libertés est précisément ce qui « engendre » les accommodements raisonnables. Pour bien saisir en quoi l'accommodement raisonnable est une conséquence du droit à l'égalité et de la protection contre la discrimination que consacrent nos Chartes, pour bien cerner le cadre du débat, je recommande vivement la lecture de cette « mise au point » publiée par la Commission des droits de la personne et de ce dossier préparé par Éducaloi.
Vous n'avez pas le temps de bondir hypertextement vers ces pages (que je vous offre pourtant sur un plateau d'argent) ? Qu'à cela ne tienne: je vais citer drette ici la définition d'accommodement raisonnable qu'emploie la Commission des droits de la personne:
Obligation juridique découlant du droit à l'égalité, applicable dans une situation de discrimination, et consistant à aménager une norme ou une pratique de portée universelle, en accordant un traitement différentiel à une personne qui, autrement, serait pénalisée par l'application d'une telle norme. Il n'y a pas d'obligation d'accommodement en cas de contrainte excessive.
(Le soulignement abusif vient évidemment de moi.)
Bon, voilà, on est en business. Ainsi informés, nous devrions au moins être en mesure d'éviter l'apocalyptisme péremptoire dont ont fait preuve certains de nos charmants personnages publics ces derniers temps (hello, Super Mario et autres André Drouin! [le conseiller municipal d'Hérouxville qui réclame que « l'état d'urgence » soit décrété, etc. etc.])
Laissons la bande de Jean-François Marçal rouler un peu... et arrêtons-la ici.
D'autre part, l'horizon des chartes permet aussi d'imposer une limite assez claire aux demandes d'accommodement. Toute demande qui irait à l'encontre des droits et libertés serait de facto et de jure irrecevable.
Ici, je trouve que le professeur de philosophie s'avance de façon hasardeuse... Même s'il tempère son assertion avec le mot « assez » (la « prudence stylistique » du « généralement » précité qui retontit...?), je trouve que Marçal évacue rapidement un aspect important du débat. Si le sujet des accommodements raisonnables soulève tant de passions et d'opinions divergentes, c'est notamment parce que les limites qui départagent le « raisonnable » du « déraisonnable » sont loin d'être tracées d'avance — elles sont, au contraire, relativement floues, sujettes à interprétation et mouvantes. Marc-André Dowd, président par intérim de la CDPDJ, écrit d'ailleurs dans sa « mise au point » que...
La délicate question des limites à l'obligation d'accommodement raisonnable en matière religieuse demeure. À partir de quel moment une demande d'accommodement devient-elle déraisonnable ?
D'une manière générale, les tribunaux reconnaissent comme facteurs pertinents pour évaluer la contrainte excessive les coûts d'un accommodement, ainsi que l'impact sur les droits d'autrui ou sur le bon fonctionnement d'une institution.
(Mon soulignement.)
Lorsqu'ils sont appelés à statuer sur « l'impact sur les droits d'autrui » que pourrait avoir une dérogation obtenue en vertu du principe de l'accommodement raisonnable, les tribunaux se prononcent sur ce qui constitue (ou non) une contrainte excessive. Prenons l'exemple connu du kirpan à l'école: la Cour suprême a établi que l'accommodement demandé par le jeune sikh n'entraînait pas de contrainte excessive — elle a affirmé que le compromis imaginé (kirpan cousu dans un étui, etc.) ne mettait pas en danger la sécurité des écoliers et du personnel (droit à la sécurité des personnes). Ce faisant, elle a annulé la décision de la Cour d'appel... qui, elle-même, avait cassé un jugement de la Cour supérieure (qui permettait le port du kirpan à certaines conditions)... Les opinions diffèrent donc largement sur ce qui constitue ou non une atteinte aux droits d'autrui.
Alors, on repassera pour le « de facto et de jure irrecevable »...
Quelle surprise: j'ai lamentablement échoué dans ma tentative de toucher à tous les aspects qui m'intéressent dans ce débat... La suite plus tard...? (Faut que j'aille me sustenter.)
Deux courtes notes supplémentaires...
1. J'aime beaucoup l'ouverture que fait Marçal à la fin de son texte. (Il attire l'attention sur « les inégalités économiques dont personne ne semble s'indigner et qui sont bien plus ravageuses pour ce qui est de la liberté et de l'égalité des citoyens. »)
2. Québec solidaire a fait une sortie aujourd'hui sur le sujet. Le topo radiophonique s'ouvre avec une déclaration d'Amir Khadir qui ressemble fort à l'élargissement de Marçal que je viens de mentionner. Malheureusement, cette portion du discours n'apparaît ni dans l'article publié sur le site web, ni dans la couverture de La Presse.
Brace yourself: je n'ai probablement pas terminé d'accaparer la section commentaires de ce billet...
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